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Grudge Origins

Grudge Origins
Pierre
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Steam par-ci, steam par-là. A force de collectionner les jeux sur disque dur, comme les hématomes lors d’un championnat de bilboquet, on se retrouve à devoir écluser son catalogue de jeux pas passionnants mais achetés un bon prix, ou du moins ce qui semblait l’être à l’époque.

L’été est assez propice pour ça, juste avant d’attaquer la valse des sorties de Noël (ce noël du jeu vidéo qui s’étend de fin septembre à début décembre), c’est le moment de faire un peu de place et de donner une dernière chance au produit avant de le désinstaller avec le vain espoir de le re-télécharger, à l’occasion.

Pour moi donc cet été je me suis tapé Batman: Arkham Origins, que le monde entier avait unanimement décrit comme le même mais en moins bien, mais m’avait fait de l’œil pour une poignée d’euros et en n’en attendant rien de plus que du contenu additionnel pour la recette bien huilée en guise de fix annuel de chauve-souris.
Et puis aussi un peu avec le but non avoué de me consoler du report du Arkham Knight bien nesk gen qui devrait tenir la console au chaud quelques semaines, parce que ne nous leurrons pas, nous n’aurons rien de mieux.

Étant gentiment fan de Batman depuis le traumatisme de la série animée diffusée par France 3 juste avant le couché (encore merci pour ça, salauds !), amateurs des films et gros dévoreur des deux précédents jeux, je pensais être tout à fait représentatif de la cible d’Origins.
En fait il n’en est rien. Le jeu doit prouver le gros de son potentiel auprès des retardataires qui n’ont fait ni Asylum, ni City et qui à la rigueur se tapent pas mal de ce qu’est Batman ou ce qu’il peut représenter, mais qui avaient reçu un chèque cadeau Amazon de tata Gilberte à utiliser à noël dernier et la furieuse envie de ne pas rater le train de la hype une troisième fois.

La ville est la même que dans Arkham City, le gameplay est rigoureusement identique, la plupart des personnages rempilent, les mécaniques sont presque toutes gardées intactes : comme un bon moine copiste, le studio Warner Bros. Games Montréal ouvert pour l’occasion s’est appliqué avec une détermination un peu triste à reproduire ce qui a marché dans les moindres détails.

Pour être tout à fait exact, 80% du jeu est suffisamment proche d’Arkham City pour semer le doute chez les moins attentifs : on tabasse du goon (c’est très bien), on résout quelques énigmes lightos (c’est moins bien), on écoute des NPC bavards (ou pas, selon son engagement) et on progresse dans des niveaux qui exhibent des collectibles à tous les étages en nous faisant bien comprendre qu’il faudra se refaire la tournée des grands ducs une fois le bout de gadget manquant récupéré (c’est vraiment, vraiment horrible).

Le problème est plus sur les 20% restants, quand quelqu’un dans l’équipe de dev s’est dit “hey, on va essayer de faire un truc nous-mêmes, avec des vrais morceaux d’idées dedans !”.
Et là c’est toujours un désastre incroyable. Vraiment hein, n’allez pas croire que je m’emporte, tout ce que Origins apporte qui n’était ni dans Asylum, ni dans City est profondément mauvais.

Les nouveaux personnages sont tout simplement ridicules (Anarky en ado attardé fait mal au cœur). Les combats de boss sont de pénibles trains-fantômes avec d’interminables séquences de QTE qui réussissent l’exploit de retirer tout le souffle épique de Batman. Les séquences de détective sont beaucoup trop nombreuses et longuettes pour maintenir éveillé. Les défis n’ont généralement aucun sens dans le contexte du jeu. Les scènes oniriques, moments clés des précédents jeux sont utilisés tout le temps, sans raison et sans apport. Les menus sont confus et plein d’effets de manches horribles (le bouton pour afficher la map devient bouton contextuel dès qu’un pallier est franchi).

Bref, tout ce qui n’a pas pu être recopié à l’échelle a été fait en dépit de tout bon sens , le reste a été simplifié et étiré de peur de manquer de contenu comme les challenges d’enigma qui se contentent d’enchainer les boutons à tapoter là où Arkham City faisait remonter l’univers de Batman au premier plan.

Et pourtant malgré tous les indices qui laissent penser que le jeu est prévu pour les nouveaux arrivants moins regardant, le jeu traite la plupart des sujets largement par dessus la jambe sans un tutoriel efficace ou une mise en contexte de Batman et refourgue directement une grosse partie du matos acquis dans Arkham City sous-entendant que quiconque fous ses pattes sur le jeu est déjà familier de la jouabilité.

Vu le metascore, je ne peux pas vraiment dire que j’ai été déçu ou surpris par la qualité globale du jeu, mais une fois encore je suis largement étonné qu’une entreprise comme Warner qui semblait avoir bien conscience de la subtilité avec laquelle ses licences doivent être traités sur un secteur aussi stratégique que le jeu vidéo puisse se lancer dans un travail ayant aussi peu de respect pour le travail de Rocksteady.
A moins que ce ne soit justement la peur de ne pas être à la hauteur qui a poussé le studio entier à faire ce remake mal assumé et peu inspiré qui n’ose jamais prendre sa propre voie.

Quoi qu’il en soit Batman mérite quand même beaucoup mieux. Ne serait-ce que pour ne pas finir soldé sur steam comme une vulgaire simue de dinos.

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