Il parait que c’était mieux avant, quand les jeux étaient sur CD et qu’on avait pas besoin de disques durs pour les stocker. Moi je trouve que c’est pas plus mal maintenant qu’on paye nos jeux une bouchée de pain dans des Bundles bien garnis.
Mais visiblement la bouchée de pain c’est pas tout à fait suffisant pour nourrir une industrie et après les premiers gros signes de fatigue des indés, c’est au tour des pourvoyeurs d’indés eux-mêmes de tirer la langue : le mois dernier Humble Bundle a dû se séparer de 12 employés. Ça parait pas grand-chose, dit comme ça, douze personnes, mais pour la start-up c’était quand même 20% des effectifs.
Un peu ballot pour une boite qui a récolté la bagatelle de 65 millions pour des œuvres caritatives.
Alors je ne sais pas bien ce qui a coincé : est-ce que les gens réduisent vraiment le « humble tip » lorsqu’ils passent à la caisse ? Ou est-ce qu’il y a juste d’une manière générale moins de gens pour acheter des jeux indés qu’avant ?
Il faut dire qu’en 2010 le concept était assez révolutionnaire. Steam Greenlight n’existait pas. Le XBLA venait à peine de célébrer ses premiers gros succès, Castle Crashers arrivait pour la première fois sur PS3 et FEZ était encore attendu par une base de fans hardcore qui ne s’étaient pas encore fait insulter. Comme les antibiotiques, acheter des jeux indés c’était loin d’être automatique et le combo bons jeux, pay what you want – vite détourné en « pay 1$ ! » - clés steam avait tout pour séduire les fanatiques, les curieux et les autres.
Plus de cinq ans et 80 bundles plus tard est-ce que la dynamique a encore lieu d’être ? Steam a embrassé les indés comme jamais, Microsoft et Sony s’en servent pour compléter les trous dans leurs packs de jeux gratuits tous les mois, la qualité globale des jeux proposés tend à baisser, les vieilles stars font plus de come-backs que Johnny Hallyday, et les vraies affaires se trouvent en général plus rapidement sur le bundle store.
Du coup les seuls moments qui valent encore le coup auprès des joueurs sont les vides greniers des gros éditeurs qui viennent s’encanailler auprès des petits et soutirer quelques biffetons à ceux qui n’ont pas craché au bassinet depuis qu’un type a trouvé comment faire sauter une clé CD.
EA, Ubi, 2K, Square, tous se relaient pour étaler leurs back catalogues archi-piratés et archi-rentabilisés pour deux semaines d’opération séduction stratégiquement placée avant la sortie d’un gros titre.
Et pour le joueur moyen le Humble Bundle est devenu synonyme de liste sans fin de clés steam jamais utilisées bien plus que d’heures passées à jouer à prix cassé.
Exit donc l’indie-only, le Humble Bundle vend désormais tout ce qu’il peut : des bouquins, de la musique, des livres audio, des t-shirts, bref tout et n’importe quoi tant qu’on peut y laisser ses coordonnées bancaires. Le Humble Bundle est devenu un genre d’Amazon de la distribution de contenus numériques avec une rotation hebdomadaire digne d’un Lidl.
Et comme Amazon le humble bundle tente de se réinventer régulièrement en trouvant de nouveaux moyens rigolo de vous faire casquer. Le dernier en date : l’abonnement. Après tout si tous les gros services par abonnement offrent des jeux gratuits, pourquoi le service de jeux gratuits ne pourrait pas lui aussi avoir son abonnement. Imparable.
Mécanisme de pochette surprise donc pour le Bundle Monthly qui promet un pack de jeux Windows tous les mois pour 12 dollars.
Combien de jeux ? Quels jeux ? Legend of Grimrock 2 qui se négocie 22€ à marée haute sur Steam.
Et le reste ? Aucune putain d’idée. Je suspecte que tout ça sera négocié chaque mois selon la pêche du jour, le nombre d’abonnés, la force du vent et la bonne volonté des développeurs qui chercheront de la visibilité.
Parce que finalement le dernier reste d’indé dans le Bundle, ce n’est pas chez les joueurs ou les éditeurs qu’on le trouve mais chez les développeurs, pour qui le Humble Bundle revêt une importance stratégique : en s’accrochant tel un bigorneau sur la coque du chalutier, on pourrait aller très loin à moindre frais et une fois qu’on a épuisé la case Sony et Microsoft, c’est jamais une mauvaise idée d’aller se dorer la pilule sur les plages d’un bundle quelconque ne serait-ce que pour faire bonne figure dans les chiffres de ventes et les stats de joueurs dans SteamSpy pour un éventuel prochain projet.
Du coup les Humble Indie Bundles c’était peut-être mieux avant, mais pour les devs, ça semble quand même encore vachement important aujourd’hui.
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