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De l'audace

De l'audace
Pierre
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On l’a vu, la switch est une machine complexe. Sans doute un peu trop complexe pour son propre bien et de toute évidence trop complexe pour les gens qui doivent la vendre.
Je pourrais hausser les épaules en racontant à quel point les gens du marketing sont des idiots qui ne prennent pas le temps de comprendre les produits qu’ils vendent, et notez bien que c’est souvent très vrai, mais il y a aussi des contraintes inhérentes à l’exercice de promotion qui font que vendre une machine qui a bénéficié d’années de R&D par des gens très malin aux consommateurs globaux revient surtout à résumer Guerre et Paix en un tweet.

Aller parler à la presse, pas de problème puisqu’on peut organiser des événements à travers le monde, on peut payer des armées de jeunes gens propres sur eux pour expliquer le pourquoi du comment sur toute une journée.
Aller parler aux fans, c’est facile aussi puisqu’on peut mettre en branle de longues conférences streamées dans le monde entier en faisant défiler chaque producteur pour qu’il vienne expliquer à quel point la machine est tip-top et tant pis si ça s’étale sur plus d’une heure de vidéo Youtube, à part Niel personne n’ira se plaindre de la place que ça prend.

Sauf que la presse et les fans ce n’est qu’une toute petite partie des gens qu’il est nécessaire de convaincre pour rentabiliser la console. Pour vraiment rentrer dans ses frais, il faut aller chercher #LeGrandPublic. C’est-à-dire les gens qui ne checkent pas Gamekult tous les jours, ceux qui ne sont pas abonnés au channel Nintendo Direct, ceux qui n’ont pas de compte twitch. Pire encore il faut réussir à faire mieux, bien mieux que la WiiU, ce qui impose d’aller chercher du public parfois loin, voire très loin des sphères d’influences de Nintendo.

Et pour ce faire, on n’a pas encore inventé grand-chose de plus efficace que la publicité. Et faire une publicité consiste pour une entreprise à jouer ses recettes dans une grande partie de roulette. On peut faire des statistiques, on peut faire des tests, on peut analyser le truc à la loupe et avec tout un tas de métriques qui vont bien, il s’agit d’une prise de risques énorme que rien ne peut pondérer.
L’enjeu pour les gens de Nintendo et les agences qu’ils mandatent est de transmettre en 30 secondes de clip, en une affiche, en un slogan, l’essence de la machine à des gens qui n’auront pas sollicité l’information et auront toutes les chances du monde de ne pas être réceptifs.

Du coup, c’est loin d’être évident quand l’essence en question consiste à dire grosso modo que bon c’est une console de salon pour jouer à des jeux vidéo sur sa télé, mais que alors on peut aussi un peu jouer directement avec la console comme avec une grosse gamegear mais attendez parce qu’on peut aussi parfois déconnecter les bords pour transformer la console en un petit iPad et que ces mêmes bords se transforment en Wiimotes et que le tout fait de la vibration HD et de la reconnaissance de mouvement et que c’est disponible en gris mais aussi en rouge et bleu et que parfois on joue seul et parfois avec d’autres gens et que même qu’on peut se connecter à internet mais que bon ce sera peut-être payant et que de toute façon on vous dit pas que la batterie est merdique mais on aimerait vraiment que vous n’alliez pas vous imaginer que c’est une console portable non plus.

Et quand vous êtes en plus la filiale de Nintendo dans des pays qui ne jurent que par les shooters et les bagnoles et où GTA V reste le titre qui bat des records de longévité, on se dit que les gants blancs, les tours de magie et les dragonnes colorées ne suffiront définitivement pas. La campagne prend alors la forme d’un casse-tête assez formidable qui doit être résolu avec des réponses simples. Et en l’occurrence la réponse la plus simple quant au pourquoi du comment de la Switch consiste à montrer que c’est une console de jeu pour télé que l’on peut aussi emmener aux chiottes le moment venu.

Une approche assez frontale et qui n’élève sans doute pas beaucoup le débat mais qui a au moins pour mérite d’accrocher le chaland et de poser les bases de l’utilisation primordiale qui sera faite de la fonctionnalité. Bref du marketing qui se met au niveau de son groupe-cible et pour un Nintendo aussi déconnecté des réalités du marché que de sa fanbase, c’est finalement loin d’être mal.

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