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L'ennemi invincible

L'ennemi invincible
Pierre
1 commentaire
La semaine dernière je tranchais quelques gorges (ou plus vraisemblablement me faisais trancher la mienne) dans l'un des modes multijoueur d'Assassin's Creed lorsque ma copine visiblement exaspérée par mon bitching intensif m'a posé la question qui tue : "Mais pourquoi tu ne joues pas au vrai jeu ?".

Comment ça au vrai jeu ? C'est le vrai jeu, même que j'y suis particulièrement pas doué.
"Non mais le vrai jeu quoi, l'histoire avec les pirates et les bateaux tout ça..."

Malgré la perturbation dans la force provoquée par le cri de dizaines de développeurs d'Annecy qui venaient sans le le savoir de se faire poignarder par la campagne de leur propre éditeur et malgré tout le bien que j'avais envie de dire du multijoueur d'AC, j'ai du esquiver avec une pirouette : "ho t'inquiète pas je tranche une gorge ou deux et je remets les pirates et les bateaux tout ça...".

Parce que j'imagine en réalité assez mal quelqu'un se procurer un Assassin's Creed et ne pas du tout toucher à la campagne. Je ne doute pas que quelques forcenés de la julienne, quelques aficionados du menu hachage se jettent sur le mode multi comme un gang de journalistes Allemands sur un buffet de salade de pommes de terre, mais l'expérience proposée est tellement un prolongement du jeu solo que dissocier les deux n'a pas beaucoup de sens.

Dans le cas de Splinter Cell en revanche, il n'y a pas le moindre doute, Sam Fisher est l'ouvreuse du spectacle et la campagne une jolie bande annonce scénarisée. Le plat de résistance, le coeur du spectacle et l'unique raison qui me fait encore investir dans ces jeux, c'est le multijoueur. Qu'on ne s'y trompe pas Tom Clancy n'est là que pour la frime (et parce qu'il a coûté cher), le vrai jeu s'appelera toujours Spies vs. Mercs dans mon coeur et si on a le temps, Splinter Cell machin chouette.

Il repose sur une une idée toute simple mais bougrement efficace : l'asymétrie a de la valeur. On se fouttrai pas mal de David s'il avait tabassé Goliath en sortant de la muscu, personne n'apprécierait James Bond s'il mesurait 2m40, avait une mâchoire d'acier et une île pleine de goons et de missiles, Pacific Rim avec uniquement des robots ne serait pas beaucoup plus qu'un nouveau Transformers.
Même la coupe de cheveux d'Olivia Wilde est tout ce qui sauve Tron Legacy.

Les espions sont agiles, rapides bardés de gadgets, ont un avantage sur les approches, sur la visibilité du champ de bataille mais ne sont pas armés et faiblement protégés.
Les mercenaires sont blindés et armés jusqu'au dents mais patauds et limités dans leur aire de jeu et champ de vision.

Sans doute le pire enfer pour la création des maps, le design des gadgets et l'équilibrage des armes, mais aussi de loin l'expérience multijoueur la plus intense lorsque les bonnes conditions sont réunies.

Tout le génie du gameplay est d'aller à l'encontre de ce qui semble intuitif pour un jeu en ligne : alors que tous les shooters cherchent à être rapides et à favoriser des affrontements incessants, Spies vs. Mercs base tout sur la lente montée de stress entre les affrontements. Lorsqu'un mercenaire trouve un espion, soit il l'abbat, soit il lui échappe mais dans les deux cas tout est plié en une poignée de secondes, alors que la recherche, la traque, l'esquive et les serrages de fesses rendent incertaine la moindre des situations.

Bref, Splinter Cell en multijoueur c'est ça. Ou plutôt c'était puisque après avoir mutilé les menus quelqu'un chez Ubi s'est mis en tête de ruiner tout l'équilibre du mode en transformant les espions en véritables machines de guerre.

Non seulement les pistolets paralysants peuvent désormais être remplacés par de bonnes grosses mitraillettes automatiques brisant la règle de non létalité des espions, mais surtout l'étranglement par derrière risqué et flippant des précédents jeux a été remplacé par un bon gros assassinat Assassin's Creed style qui ne nécessite qu'une pression sur X pour réaliser un frag instantané sur les mercenaires par derrière, par devant, en dessous, au dessus, accroché, accroupi, debout, bref tout le temps.

Ajoutez à cela le retour de la capacité des espions de se rendre invisibles sur une courte durée et l'infinité du respawn et vous devez commencer à imaginer une partie standard sur le live : en mercenaire on passe son temps à se faire enchaîner par des espions invisibles qui se taillent un chemin vers l'objectif à la lame et en groupes virevoltant comme dans un remake hardcore de West Side Story version cagoules et kevlars noirs.

Dans une partie typique les espions réussissent donc à inscrire le plus grand nombre de frags, humiliant les mercenaires sur leur terrain de prédilection et les forçant à miner toute la map, et à camper dans un coin en lançant des drônes explosifs tout en serrant les fesses pour que leur point de défense ne soit pas la première cible visée.

Peut être que je n'ai juste pas encore le jeu complètement en mains, peut être qu'il y a effectivement du très bon et de grosses sensations, notamment sur le mode "classic" à la Pandora Tomorrow.
Mais peut être aussi que dans sa volonté de recycler le gameplay d'Assassin's Creed dans un Splinter Cell, ubi a aussi un peu perdu de vue ce qui composait l'essence du vrai jeu.

Commentaires

  • Gomozilla |
    On voit qu'il y a eu tout un travail de recherche sur le sujet de la coupe de cheveux d'Olivia Wilde dans Daft Punk movie.

    Va falloir qu'on appelle les bretons indépendants pour qu'ils ajoutent ' "un remake hardcore de West Side Story version cagoules et kevlars noirs" - BH' sur la pochette.